
Ce 21 août 2025 à 19h00, les jeeps, command car, half-track, automitrailleuses antiaériennes, dodge transport de troupe et leurs soldats en tenue d’époque ont remonté fièrement en libérateurs l’avenue Gambetta sous les applaudissements d’une foule nombreuse. Mais qu’en était-il de l’atmosphère dans notre ville de Hyères voila 81 ans ?
Il y a 81 ans, la libération de Hyères se faisait après de violents combats au Golf Hôtel. Ce prestigieux hôtel de la belle époque, édifié à l’entrée Est de la ville, dominait de ses 5 étages les accès en provenance de Cavalaire, le Lavandou où les soldats français de la 1ère Division Française Libre (1ère D.F.L) venaient de débarquer avec les alliés dans le cadre de l’opération « Dragoon ».

Comme il était décrit à l’époque, le Golf-Hôtel d’Hyères était un vaste cube de maçonnerie aménagé en forteresse par les Allemands, hérissé d’armes automatiques, entouré de barbelés. Suite aux premières attaques du 20 et 21 août, il était indispensable de réduire ce dernier bastion de résistance, afin d’ouvrir la route de Toulon et permettre aux Fusiliers Marins et à leurs engins de continuer à progresser. L’assaut conduit par le Commandant Magendie à la tête d’une centaine de volontaires du Bataillon d’Infanterie de Marine et du Pacifique (B.I.M.P) va durablement marquer l’histoire de la Division Française Libre.

Le Golf-Hôtel, immense bâtisse transformée en forteresse avec des souterrains, des casemates blindées et des observatoires, domine la plaine du Gapeau. Le 24ème Bataillon de Marche (B.M.24) est bloqué par le fleuve du Gapeau et des barbelés intacts. Les unités qui attaquent subissent un violent bombardement, les mitrailleuses allemandes crachent toujours.
Pour vous donner une idée de l’âpreté des combats voici le témoignage du Sergent Marcel NALLIER, du Génie dans la revue Bir Hakiem l’Authion n° 154, octobre 1994
« En début d’après-midi, le Lieutenant ARNAUD commandant ma Compagnie me demande de déminer les ados de salines, afin que l’on puisse faire sauter les barbelés protégeant l’approche de cette forteresse. Je pars avec un démineur, SALVIANI, ces ados sont étroits, il faut progresser côte à côte. A peine avons-nous parcouru une dizaine de mètres qu’un coup de feu claque, rageur, celui du « Mauser » d’un sniper.
Le détecteur de mine me tombe dans les jambes, Salviani qui le tenait tombe dans la saumure, en me disant, avec son accent corse rocailleux, « je suis touché ». Il ne pousse pas un cri. La balle est entrée dans le ventre, traversant le paquet de pansement fixé après le ceinturon et sortie dans le dos, près de la colonne vertébrale. Je descends dans la saumure où j’enfonce, je parviens à le remonter et à l’allonger sur l’ados. Le sniper ne tire plus, il aurait pu nous abattre tous tes deux, il ne l’a pas fait, merci à lui. Salviani geint, il souffre terriblement de ce sel qui humecte ses blessures. Nous sommes couchés, maintenant les mitrailleuses prennent le relais mais ne peuvent nous toucher. Les balles sifflent au-dessus de, nous.
Devant moi, ma Thomson semble ridicule. Il fait chaud, très chaud. Les moustiques nous dévorent. Chaque fois que Salviani lève un bras, les rafales recommencent. Il me supplie de l’achever, je le fais patienter comme Je peux. Personne ne peut venir nous chercher, cet après-midi-là est long, très long sous ce soleil. Le soleil commence à baisser, un déluge de feu et de fumigènes s’abat sur le Golf-Hôtel. Vers 19 heures, tout est fini. On vient nous chercher. 160 allemands seront faits prisonniers dont une quarantaine de blessés. Salviani, quant à lui, est décédé à l’âge de 64 ans, paralysé des membres inférieurs.«
La prise du Golf Hôtel par les soldats du BIMP fait sauter le verrou qui stoppait l’avancé des troupes. A 18h30, celles-ci exténuées par ces combats peuvent enfin reprendre leur progression pour libérer la ville. Faisant la jonction avec les unités ayant contournées par la plaine de La Crau, le B.I.M.P recomposé se dirige vers Toulon qui, après des combats très meurtriers, sera à son tour libéré le 26 août.

Récit des combats par le général Edmond Magendie
Après la guerre, les ruines du Golf-Hôtel ont été rasées, laissant place aujourd’hui à une caserne de gendarmerie. Depuis 1984, une plaque y a été apposée indiquant : « Ici en Août 1944 s’élevait le prestigieux Golf-Hôtel, fortifié par la Wehrmacht. Ce verrou résista 40 heures aux attaques de la 4ème Brigade de la 1ère D.F.L. Le 21 août, sur les renseignements d’un jeune hyérois, Pierre Allaria, 100 volontaires du Bataillon d’Infanterie de Marine et du Pacifique, sous les ordres du capitaine Magendie, prirent l’hôtel d’assaut capturant 180 survivants . Hyères était libéré, la voie vers Toulon était ouverte».

Revenons au 21 août 2025 ou l’ambiance était plus festive le long de ce défilé de véhicules d’époque. Le défilé a été fortement applaudi tout le long du parcours jusqu’à la place Clémenceau et pour rester dans l’esprit de l’anniversaire de la libération de la ville, la soirée s’est poursuivi à 21h30 par un concert des Swing Délirium.

81 ans après, c’est la fête, mais il ne faut pas oublier le sacrifice de ces hommes dont le général Magendie dira :
« ils ont admis une fois pour toutes que l’amour de la patrie se manifeste par les actes et que les discours sont à l’usage de ceux qui n’ont rien compris. Entre hommes qui vivent et meurent pour reconquérir leur patrie, on y pense toujours et on n’en parle jamais.«
CIL Gambetta
Sources :
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